01/01/2020
colloque international à l’Université de Nagoya (Japon), les 9 et 10 novembre 2019
Ce colloque visait d’abord à renverser la perspective : plutôt que sur l’image de Ruskin chez ses lecteurs français, notre intérêt a porté sur la France découverte par l’esthéticien d’outre-manche. Il a d’abord tourné un regard plus ou moins hostile vers les églises catholiques, abondamment ornées de figures humaines et de divers motifs de nature (sculptures, vitraux, mosaïques et peintures murales). Mais il n’a pas tardé à admirer l’expression des sentiments humains et la délicatesse de l’observation de la nature que les artistes du culte « idolâtre » appliquaient aux scènes bibliques. Certes, il a consacré milliers de pages à l’art et aux paysages de l’Italie, centre de l’art chrétien. Mais le Nord de la France ne représentait pas pour lui un simple point de transit. La poésie des plaines doucement ballonnée, des rivières et des forêts de cette région l’ont inspiré aussi bien que ses peintres favoris (Turner, Prout, Bonington, etc.). L’art gothique l’enchantait grâce à ses caractéristiques inconnues de la tradition classique de l’Europe méridionale, qui consistent, d’après lui, dans la simplicité presque sauvage de son exécution et la représentation fidèle de la végétation régionale.
Les derniers résultats de la recherche en histoire de l’art confirment que l’écrivain est toujours consulté par les spécialistes d’aujourd’hui, grâce à son interprétation aussi lyrique que scientifique vis-à-vis de la civilisation européenne et surtout de son art. De même, sa philosophie esthétique et ses théories sur le dessin ont largement inspiré les artistes du XXe siècle. Sa contribution est ainsi indéniable dans l’histoire de l’art de multiple manière. Ses analyses iconographiques ont également renouvelé le symbolisme chrétien dans la littérature française.
Ce colloque a apporté de nouveaux éclairages sur des épisodes dans À la recherche du temps perdu et ses avant-textes où, à l’instar de Ruskin, l’écrivain recourt à des allégories catholiques dans des contextes laïques et même profanes. Proust est également influencé par la vision ruskinienne de la nature qui manifeste des affinités intéressantes avec celle des paysagistes français (arts plastiques et littérature).