
«Traduire d’une langue à une autre… c’est comme regarder à l’envers des tapisseries flamandes : bien qu’on en distingue les figures, elles sont pleines de fils qui les obscurcissent et ne sont pas visibles avec l’uni et la couleur de l’endroit ». (Miguel de Cervantes). Image : Endroit et envers d’une tapisserie de F. Damoiselet, “Les Jeux d’enfants” (XVIIIe s.), détail. Image aimablement cédée par Arnaud Denis, Paris, Collection Mobilier national.
À l’intersection de l’histoire de la traduction et de l’histoire de la littérature dans l’Espagne moderne, cette étude s’intéresse aux textes étrangers qui, par le biais de la traduction, ont été intégrés au patrimoine littéraire espagnol : d’une part, les ouvrages qui rendent en espagnol les textes grecs et latins, incorporant ainsi dans la langue moderne des œuvres canoniques de l’Antiquité classique ; d’autre part ceux qui partent d’œuvres contemporaines, néo-latines ou d’autres vernaculaires, pour les assimiler au canon institué par les littératures classiques et les lire comme des classiques modernes. La traduction réunit ces deux types de “classiques” pour en faire des modèles pour la littérature castillane du XVe au XVIIIe siècle. Nous nous intéressons donc aux traductions littéraires, qui couvrent non seulement la poésie et la fiction narrative et dramatique mais aussi ce que l’on a appelé à l’époque moderne l’éloquence et qui comprend les historiens, les moralistes, les prédicateurs et les philosophes. À partir du corpus ainsi défini, nous entendons observer le phénomène de la traduction à travers ses effets sur la langue cible et sa littérature, dont les règles et les canons exercent une action normative sur la traduction tout en étant influencés par elle. L’étude philologique et historique d’une série de cas, permettra de confronter la pratique et la théorie de la traduction et d’interroger les frontières floues et fécondes entre traduction et création.
Dans le cadre du programme se tiendront à Madrid deux colloques, l’un consacré à l’exercice de “retraduction” d’une même œuvre (2024), l’autre consacré aux écrits frontaliers de la traduction : gloses, paraphrases ou encore commentaires (2026). En parallèle, un séminaire bimodal se tiendra à Paris (ENS-PSL, ITEM) et en ligne pour nous plonger dans le laboratoire de la traduction et ses liens avec la création littéraire vernaculaire (2025-2026). Ces travaux alimentent la base de données Translatio, qui recense le corpus ainsi mis au jour.
Institutions partenaires :
École normale supérieure-PSL
Sorbonne Université-CLEA
Universidad Complutense de Madrid
Universidad Rey Juan Carlos
Université Paul Valéry de Montpellier
Coordinateurs du projet :
Roland Béhar (École normale supérieure-PSL)
Mercedes Blanco (Sorbonne Université-CLEA)
Miguel Herrero de Jáuregui (Universidad Complutense de Madrid)
Adrián Izquierdo (Universidad Rey Juan Carlos)
Aude Plagnard (Université Paul Valéry de Montpellier)
Pour de plus amples informations, voir la page du projet sur le site de la Casa de Velázquez.