12/04/2012

Journée d’études organisée par Guillaume Perrier dans le cadre des travaux de l’équipe Proust de l’ITEM, le 12 avril à l’ENS, salle des Actes, de 9h30 à 18h.

Avec la participation de: Jean-François Chevrier, Valérie Fasseur, Luc Fraisse, Dana MacFarlane, Catherine Malabou (sous réserve), Claude Mouchard, Guillaume Perrier, Paule Petitier, Christophe Pradeau.

 contact: guillaume.perrier@gmail.com

         Au-delà de la mémoire naturelle, dont l’étude relève en priorité du champ scientifique, la mémoire artificielle – la mémoire renforcée par l’être humain, quelle que soit la technique employée – peut faire l’objet d’une étude historique, linguistique et littéraire. Les données biographiques et socio-culturelles jouent un rôle non négligeable. Mais la mémoire n’est pas une faculté entièrement donnée a priori. C’est une disposition, une vertu développée en fonction d’un contexte, d’une expérience et d’un projet précis. Elle contribue à la constitution du sujet écrivain.

         Dans cette perspective, le modèle antique et médiéval de « l’art de la mémoire » est important, pour au moins deux raisons. Il permet d’affranchir la mémoire de l’idéalisme romantique et de la comprendre non seulement par rapport au passé d’un vécu personnel mais aussi par rapport à une pratique présente et un projet futur. Il permet de réhabiliter la mnémotechnie, au sens littéral du terme : de penser le rapport entre mémoire et technique – technique scripturale, en l’occurrence. Les préjugés, y compris proustiens, en faveur de l’imagination et du souvenir involontaire, contre la mémoire volontaire, contre les procédés mnémotechniques et l’apprentissage scolaire « par cœur », empêchent de penser une pratique effective qui peut prendre chez le sujet écrivain une dimension éthique et esthétique.

        Cette réflexion concerne également notre propre mémoire, savante et informatisée. Les bases de données et les moteurs de recherche permettent de retrouver n’importe quelle référence ou citation. Les archives et la prétendue mémoire matérielle s’accumulent dans des proportions inédites, y compris sous une forme dématérialisée. Elles tendent à devenir universellement et instantanément disponibles, sans être pour autant maîtrisées par la pensée. Quelle démarche adopter, dès lors, pour penser la mémoire de l’écrivain au travail ?

Éléments bibliographiques : M.-H. Caraës et N. Marchand-Zanartu, Images de pensée, RMN, 2011 – M. Carruthers, Le Livre de la mémoire. Une étude de la mémoire dans la culture médiévale [1990], trad. D. Meur, Macula, 2002 – A. Compagnon (dir.), Proust, la mémoire et la littérature, Odile Jacob, 2009 – J. Derrida, Mémoires. Pour Paul de Man, Galilée, 1988 – L. Marin, « Le trou de mémoire de Simonide » [1987], Lectures traversières, Albin Michel, 1992, p. 197-209 – G. Perec, « Le travail de la mémoire » [1979] », Je suis né, Le Seuil, 1990, p. 81-93 – J. Roubaud, L’Invention du fils de Leoprepes. Poésie et Mémoire, Circé, 1993 – J. Schlanger, La Mémoire des œuvres [1992], Verdier, 2008 – F. A. Yates, L’Art de la mémoire [1966], trad. D. Arasse, Gallimard, 1975.