Sommaire
L’image est donc soumise à un travail incessant de métamorphose, de suppressions et d’additions, de dissociation et de corrosion2.
Théodule Ribot
Au xixe siècle, nombreux sont les écrivains qui, dans l’acte de création littéraire, pratiquent simultanément l’écriture et le dessin. De Hugo à Pouchkine et de Stendhal à Zola, s’affirme la volonté de transgresser les oppositions de genres qui renvoient à l’ut pictura poesis de Horace et furent théorisées par Du Bos dans ses Réflexions critiques sur la poésie et la peinture (1719), puis critiquées par Lessing dans son Laocoon (1768). L’édifice de l’art classique reposait sur ces oppositions. Que les dessins soient des griffonnages marginaux fonctionnant comme des catalyseurs de l’imagination ou qu’ils soient des illustrations – comme dans le cas d’un Léon Bloy, écrivain et enlumineur – une pratique nouvelle remet en question la vision académique qui opposait la ligne claire et lisible du dessin à l’opacité de l’écriture. L’apparition de l’écrivain dessinateur qui combine des systèmes d’expression rivaux incite alors à se demander quelles explications techniques et artistiques fournissent les raisons de cette innovation, en particulier dans la seconde moitié du xixe siècle chez un romancier comme Émile Zola et comment se définit ce nouveau langage hybride.
De ce point de vue, les quelque trois cent dessins et croquis insérés dans les vingt dossiers préparatoires des Rougon-Macquart méritent une analyse spécifique, relevant à la fois des « arts graphiques » et de la génétique textuelle. Le croquis crée une organisation topologique (la « carcasse ») et les notes manuscrites verbales remplissent le cadre, d’objets, d’odeurs et de lumière. Chez Zola, le croquis ne fournit pas, comme chez Stendhal3, le tracé qui permet à l’égotiste de revivre plus intensément la scène vécue et il n’appartient pas non plus, comme chez Hugo, à une écriture où s’associent vision graphique et vision poétique. Inséparable des mutations que connaît le dessin industriel à l’époque, le croquis, élevé au statut de « genre de notes » par Pierre Larousse dans son Dictionnaire universel du xixe siècle (article « croquis »), est utilisé par Zola pour construire une topographie de même qu’en architecture ou en ébénisterie il servait à indiquer « tantôt un système de proportions, tantôt un agencement ou le jeu des pièces et des organes » :
Le croquis est, dans les arts du dessin, ce qu’est la pochade en peinture, ce que sont les notes pour l’écrivain. C’est bien en effet un genre particulier de notes plus ou moins précises, jetées rapidement sur le papier, et qui indiquent à l’aide de quelques traits, une attitude, un mouvement, un arrangement, les grandes lignes d’un paysage, les formes caractéristiques des objets dont on veut se souvenir.
Les très nombreux dessins techniques d’ingénieurs ou de spécialistes garantissent l’exactitude de l’observation dans des romans comme Germinal (dessins de galeries, de berlines), La Bête humaine (conseils de Pol Lefèvre), ou encore La Débâcle (levés topologiques d’officiers). La pratique graphique du romancier de la modernité est liée à l’évolution des techniques de représentation de l’objet industriel4.
Malgré les apparences, il n’en est pas autrement des croquis, réalisés sur le terrain, dans les Carnets d’enquêtes qui, en quelques traits crayonnés à la hâte, caractérisent très sommairement un motif architectural (corniches, rampes, balcons du Bon Marché) ou un lieu urbain (carrefour dans un coin de Passy pour Une Page d’amour, arrière-cour du théâtre des Variétés pour Nana). Certes grossière et même incorrecte, comparée aux croquis techniques des « spécialistes », cette « sténographie du dessin » (selon l’expression de Pierre Larousse) que l’on observe chez Zola n’en demeure pas moins en rapport avec la pratique traditionnelle du dessin dans les carnets de voyage des écrivains telle qu’elle est décrite dans le Dictionnaire universel du xixe siècle :
C’est ainsi que font beaucoup de voyageurs ou d’artistes attachées à des expéditions : ils n’envoient le plus souvent que des croquis aux éditeurs qui publient des dessins gravés ou lithographiés [...]. On remet ces croquis à des dessinateurs habitués à ce genre de travail, qui les reproduisent en les corrigeant et en les interprétant de façon à se rapprocher le plus possible de la vérité probable.
Ce travail de correction et d’interprétation en imagination du croquis n’est pas propre à Larousse. Vers 1860, Charles Blanc écrit dans sa Grammaire des arts du dessin : « En architecture, le dessin, c’est la pensée même de l’architecte ; c’est l’image présente d’un édifice futur. Avant de s’élever sur le terrain, le monument se dessine et se dresse dans l’esprit de l’architecte ; il le copie d’après ce modèle médité, idéal, et sa copie devient à son tour le modèle que devra répéter la pierre5 ».
Chez Larousse, comme chez Blanc donc, le croquis est conçu comme un objet sémiotique incomplet appelant un travail de l’imaginaire autour de possibilités figuratives. Ce rapprochement du croquis et de l’imagination invite à rappeler l’intérêt croissant de médecins de l’époque, comme Ribot, Baillarger ou Brierre de Boismont pour les facultés imaginatives6. À ce titre, ce que le croquis matérialise dans le cas de Charles Blanc ou ce qu’il produit dans l’esprit de son observateur, dans l’extrait de Pierre Larousse, c’est ce nouveau sujet d’étude que représentent les images mentales7, objet de fascination pour les savants de l’époque qui compilent et interprètent les hallucinations hypnagogiques et les rêves éveillés de leurs patients, dont certains sont illustres : Zola les confie au docteur Toulouse8, et Flaubert confesse à Taine, qui fait une enquête sur le sujet auprès des écrivains, le pouvoir des images inventées comme celles de l’agonie d’Emma Bovary qui le hantaient tandis qu’il rédigeait l’épisode9. Sur un plan moins médical, et plus pédagogique, l’architecte, comme le philosophe s’accordent à penser que le dessin contribue au développement de l’esprit. Le discours pédagogique que tient Viollet-Le-Duc dans Histoire d’un dessinateur (1873) rejoint les thèses soutenues par Taine dans De L’intelligence (1870)10. Ainsi l’architecte clôt-il son ouvrage en expliquant que le dessin développe l’intelligence et forme le jugement puisqu’il apprend à observer, et que voir c’est savoir.
Dans le cas de Zola, on sait que le rapport entre écriture et peinture s’est très tôt établi grâce à ses relations avec Cézanne. Il a ainsi pu participer plus ou moins directement à de nombreux débats théoriques : discussions sur l’opposition de la ligne et de la couleur (Ingres-Delacroix), débat avec Cézanne sur le réalisme de Champfleury, débat sur la peinture de Manet dont Zola se fait le défenseur (1867). Cette fréquentation continue des arts graphiques forme un regard, une « pensée visuelle » (R. Arhneim), voire des délires d’images. C’est ainsi que le jeune Zola de vingt ans écrit à Cézanne, en 1860 : « J’ai fait un rêve l’autre jour. J’avais écrit un beau livre, un livre sublime que tu avais illustré de belles, de sublimes gravures. Nos deux noms en lettres d’or brillaient, unis sur le premier feuillet, et, dans cette fraternité du génie, passaient inséparables à la postérité. Ce n’est encore qu’un rêve malheureusement11 ».
Dans la seconde moitié du xixe siècle, le croquis est un genre de représentation plus codifié qu’on ne pourrait le penser en regardant les « croquades » parfois maladroites de Zola et en même temps un objet graphique lacunaire, appelant un supplément imaginaire, donc l’invention d’une fiction. Le croquis revêt une fonction technique et pratique liée à des contraintes idéologiques et textuelles, puisqu’il prouve la crédibilité du savoir investi dans le roman, et qu’il parle aux yeux ; il conserve la distribution des lieux tout en permettant d’ajuster précisément les déplacements des personnages. Mais simultanément, l’imaginaire topologique du romancier s’y projette sous la forme de figures spatiales génériques12, matérialisées graphiquement par des « croisées » (le quartier de la Goutte d’Or), des lignes (la voie ferrée entre Paris et Le Havre), des enceintes (le Paradou, Plassans). Ces croquis fournissent un tremplin à l’imaginaire : à la fois scène, échiquier, territoire ou théâtre d’opérations en miniature, ils sont progressivement habités et modifiés par les personnages, par les scénarios et les valeurs que romancier invente au cours de son travail préparatoire. Le dessin s’anime et cette animation constitue un processus fondamental de la création voire d’une première mise en écriture romanesque13.
Les croquis permettent à la fois un investissement de l’imagination, des compétences cognitives, des souvenirs personnels, voire des images refoulées. Ils invitent donc à développer une analyse qui, sans négliger la sémiotique graphique, accorde une place prépondérante aux fonctions pratiques et imaginaires du dessin.
Ce sont quelques croquis d’un écrivain à l’œuvre qui vont servir maintenant à illustrer ce préambule théorique et historique. Un des thèmes fondamentaux des Rougon-Macquart est le thème de l’arbre : cèdre et cyprès symboliques de La Faute de l’abbé Mouret, métaphores extraites du règne végétal dans La Débâcle, simple motif décoratif dans le paysage de tel ou tel roman. Mais l’arbre, en-deçà du thème, est aussi investi, en tant que schème de pensée, dans le développement du cycle romanesque. L’arbre généalogique fait son apparition dans les « Notes préparatoires » (1869) en tant qu’outil taxinomique et sa forme graphique rappelle moins la silhouette naturelle de l’arbre que l’organigramme d’un système complexe mais néanmoins organisé. Le motif de l’arbre sert donc de schème mental et assure la distribution, la hiérarchisation, l’orientation d’éléments ou de flux : « L’aïeule est la haute personnification d’un tempérament, d’un état physiologique particulier se propageant et se distribuant dans toute la famille14 ».
Il serait sans doute intéressant de se demander si parmi tous les dessins de la main de Zola, il n’existe pas une catégorie de tracés qui morphologiquement et fonctionnellement s’apparentent à ce schème fondateur, symbole de toute une philosophie romanesque. En effet, dans le projet du romancier, chaque roman se doit d’illustrer la préface de La Fortune des Rougon dont les mots-clés, sont, rappelons-le, « somme », «poussée », «appétit », «complexité des efforts », «fil », «mathématique ». L’espace romanesque construit par les croquis ne serait-il pas de façon privilégiée le lieu où se matérialise le plus aisément cette dynamique naturelle et sociale de la famille ?
La finalité d’une analyse plus totalisante que celle mise en place dans cet article viserait l’élaboration d’une grammaire iconique du dessin zolien qui s’intéresserait autant à l’agencement spatial des lieux, qu’à l’actualisation d’archétypes topologiques liés aux contraintes d’un genre et de projets mais aussi en relation étroite avec des compétences cognitives et imaginatives.
Les quatre dessins sélectionnés15 sont loin d’être identiques mais quelques similitudes invitent, au moins intuitivement d’abord, à les rapprocher. Dès le premier coup d’œil porté aux croquis extraits des dossiers préparatoires de La Fortune des Rougon (1870), de La Faute de l’abbé Mouret (1875), de La Joie de vivre (1884) et de La Débâcle (1892), ressort la nature curviligne, ondulante ou serpentine des courbes qui s’étalent et se resserrent dans l’espace de la feuille. Pour au moins deux d’entre eux, le dessin de La Faute de l’abbé Mouret et celui de La Joie de vivre, on pourrait invoquer la relative liberté de la main en mouvement inspirée par un imaginaire topologique affranchi des contraintes du décalquage cartographique. Pour l’ensemble, il semblerait que la nature géophysique des terrains, tous plus ou moins en relief, prédétermine les choix graphiques : vallonnements de l’Alsace pour le dessin de La Débâcle, escarpements des falaises de la Manche dans La Joie de vivre, gouffres et montagnes dans l’arrière-pays du Var. Ces configurations naturelles stimulent sans doute, chez le romancier, l’imaginaire graphique du pli16. Ce motif générique s’associe mentalement au modèle de la topographie vallonnée : « grand pli de terrain séparant le Paradou du village », écrit Zola dans l’ébauche et le dessin de La Faute de l’abbé Mouret ; « village en bas après un pli de terrain qui dévale », écrit-il encore dès les premiers feuillets du nouveau plan de La Joie de vivre17. Dans les romans, le motif du pli peut aussi venir enrichir, en tant que détail réaliste, la description d’une étoffe ou d’un rideau.
Néanmoins, la fantaisie du dessinateur ou les images mentales qui proviennent peut-être des souvenirs n’expliquent que très superficiellement la fonction pratique du dessin dans les avant-textes. C’est un point de vue plus sémiologique qu’il faut adopter. Placée à l’ouverture du Plan détaillé de La Fortune des Rougon, la carte de la région du Var centrée autour de Plassans et servant de cadre à l’insurrection républicaine en 1851, relève graphiquement de la logique arborescente, de même que la carte de l’Alsace, insérée avec les notes de Bibesco sur les premières campagnes du septième corps, en août 1870. Alignement des villes, nœuds routiers de distribution, croissance orientée verticalement ou horizontalement, limitent une expansion qui diffère de celle du réseau, par définition polyorienté et non hiérarchisé, mais qui tolère, comme l’arbre généalogique, le bourgeonnement inattendu d’une pousse nouvelle. Dans La Fortune des Rougon, Zola raccroche tardivement la ville de Faverolles à la route de Saint Martin-de-Vaulx et invente arbitrairement une bifurcation pour les besoins du roman, pratique qui rappelle le rajout tardif de Jacques Lantier à l’arbre généalogique. Qu’elle représente des routes réelles ou des routes imaginaires, la cartographie est donc sélective et orientée : les ellipses graphiques de lieux ou de chemins (une route stratégique qui joint Huningue à Altkirch est mentionnée dans les notes de La Débâcle mais n’est pas dessinée) ou, à l’inverse, l’invention de lieux visent à donner à l’ensemble du croquis une configuration arborescente.
Il n’en va pas autrement pour les dessins d’ensemble de la topographie de La Faute de l’abbé Mouret et de La Joie de vivre. Un nœud en forme de X, certes unique mais central, symétrique dans un cas et dissymétrique dans l’autre, suffit à réactiver le modèle de l’« arbre ». Le « chemin de Plassans à La Palud » touche l’enceinte du Paradou. C’est aussi le croisement des sentiers qui descendent à la plage de Verchemont. Ce point central est un échangeur qui est au centre du drame : frôler de façon asymptotique le rempart du désir ou le franchir, le déflorer par la brèche (frère Archangias), par le gouffre (Albine) ou par le chemin de terre (Serge), sont autant de voies possibles qui concrétisent les tensions internes, conscientes ou inconscientes, que semblent devoir vivre les personnages de La Faute de l’abbé Mouret, soumis au même choix qu’Hercule, à la croisée des chemins du Vice et de la Vertu18. La même inscription dans l’espace des volontés et des désirs préside au choix de la fourche dans La Joie de vivre : le Lazare « contemplatif » à la terrasse face à la mer, et le Lazare « actif » parti pour Paris, en quête de nouveaux projets ne sont que l’avers et le revers de cet « homme ondoyant et divers », ce « moi moderne » que convoque Zola dans l’ébauche et qui semble mis en abyme dans les lignes ondulantes des reliefs19. Enfin, dans le roman militaire, chaque fourche symbolise l’hésitation dramatique des officiers qui, contre leur gré, dispersent les corps d’armée : « On assista à cette effroyable tragédie : pas de plan, des volontés contraires20 ».
Il ressort que la limite entre réalité et fiction se brouille dans les croquis, le référent fût-il réel ou imaginaire, comme le prouve le retour de ces invariants figuratifs. Zola l’a affirmé maintes fois à ses détracteurs, dès La Fortune des Rougon :
Je plierai le cadre historique à ma fantaisie, mais tous les faits que je grouperai seront pris dans l’histoire (livre de Tenot, Maquan, journaux de l’époque, etc.) Je prendrai de la très curieuse insurrection du Var les détails les plus caractéristiques et je m’en servirai selon les besoins de mon récit21.
La primauté des contraintes romanesques fait de toute transposition une invention. Ces contraintes se résument en quelques mots : régler la circulation des personnages et des échanges, donner à leurs déplacements un souffle épique et matérialiser spatialement le modèle darwinien de la lutte.
Pour cette raison sans doute, Zola privilégie dans la confection du dessin le principe d’alignement géométrique. Dans La Fortune des Rougon, la ligne est un pur fait d’invention qui repose sur deux procédés : la création d’une route directe, inexistante à l’origine, afin de relier les deux localités principales22 (Vidauban et Aups) et l’altération des positions cardinales relatives (la ligne qui joint les villes forme en réalité un S) pour clarifier les positions ordinales des villes traversées par les colonnes d’insurgés et épouser le déroulement de la chronique inspirée par l’Histoire :
Les insurgés sont partis de Plassans le lundi dans la nuit ; arrivés à Orchères le lundi matin ; passés à Orchères le mardi et le mercredi jusqu’au jeudi à une heure. De là allés à Sainte Roure où ils arrivent le soir ; passés la nuit ; le vendredi matin bataille23.
La topographie alsacienne connaît elle aussi quelques transformations de distances et de positions. Bien que mineures, elles sont néanmoins signifiantes : l’œil et la main du dessinateur suivent, au moment du tracé, les lignes d’un échiquier mental qui décompose et recompose l’information cartographique : alignement de Belfort, Dannemarie, Altkirch, Huningue, parallélisme des lignes qui joignent Belfort, Colmar, Schelestadt d’un côté et Dannemarie, Mulhouse et Marckolsheim de l’autre. Cette structuration n’est ni aléatoire ni prédéterminée. Elle illustre en fait un processus mental de création dont l’existence est corroborée par les croquis marginaux qui géométrisent toutes les configurations topographiques : ainsi les villes de Mulhouse, Dannemarie et Altkirch deviennent, au coin d’un feuillet de notes sur l’ouvrage de Bibesco, les sommets d’un triangle qui transpose des situations statiques et un espace territorial en un système de forces et de vecteurs dans un espace euclidien. Les alignements figurent alors les lignes d’attaque, les percées et les couloirs les plus stratégiques des opérations militaires prussiennes réelles ou attendues : passage du Rhin à Huningue et attaque d’Altkirch ou percée de Marckolsheim, annoncée par une dépêche de Schelestadt. Ces schématisations participent donc d’une stratégie d’écrivain qui dégage les traits saillants d’une topographie réelle, qui aura dans le roman un rôle central comme dans l’Histoire.
Aussi, le tacticien Zola met-il à l’épreuve, sur son dessin, des manœuvres révisées au fur et à mesure que progresse l’invention romanesque : les ratures d’espace sur les croquis traduisent cet ajustement tactique. Pour privilégier le tropisme ascensionnel épique, qui se précise au cours de la recherche scénarique, et la force centripète des insurgés qui se rassemblent dans La Fortune des Rougon, Zola rature le raccourci qui joint La Palud à Saint-Martin : « A chaque embranchement, des troupes se joignent. Les insurgés sont d’abord persuadés que la France entière se lève comme eux (de Dignes prirent Salernes, p. 171). Enthousiasme24. »
Dans La Débâcle, qui est inversement le roman de l’émiettement, les deux routes parallèles qui joignent Mulhouse à Dannemarie entament l’unité d’action car elles font figure de pléonasme spatial. Malgré le cahier des charges du roman historique qui voudrait que leur existence soit respectée, Zola en supprime pourtant une dans ses notes et, comme pour le dessin précédent, privilégie, grâce à la métonymie, la logique de l’arbre à celle du réseau : « On s’en allait par deux colonnes, l’une par Dannemarie, l’autre par Altkirch. Ne parler que d’une. Douay va en avant, les Prussiens pouvant arriver d’Huningue par une route directe25». De même, dans La Faute de l’abbé Mouret, Zola dévie la route de Plassans pour éviter le village des Artaud : c’est à la fois protéger la tribu biblique et mythique du contact avec le temps social de la civilisation et réduire le rôle du Docteur Pascal, qui, n’étant que le catalyseur de la faute, doit rester à distance de la famille Artaud et demeurer au second plan dans ce roman qui n’est pas encore le sien. Par contre, il croisera Serge à la Croix-Verte pour le conduire à Albine : « Je crois que je ferai bien, pendant toute cette seconde partie de ne pas montrer Pascal ni l’oncle. Les explications sont inutiles26 ».
Les mouvements des corps d’armée en marche, des colonnes d’insurgés ou des personnages singuliers respectent donc une même logique : le romancier, suivant des contraintes propres à chaque roman, gère dans les croquis le nombre et la topologie des nœuds où sont susceptibles de se croiser les acteurs et les valeurs du roman. Une poétique et une poïétique iconique du croisement est ici en jeu.
En tant que telle, sa fonction est cruciale, bien sûr dans la distribution des circuits, mais aussi dans celle du temps, compté et tactique des opérations militaires, car il participe au rendu de leur simultanéité : il ajuste, le long des lignes, les troupes dont les mouvements peuvent être contraires (marches et contre-marches), simultanés (déploiements), ralentis ou accélérés (retraite). C’est le traditionnel problème des trains qui se croisent, proposé jadis au certificat d’étude, qu’il faut résoudre :
Le préfet part de Plassans le matin presqu’à la même heure que les insurgés partent d’Orchères. La troupe avance à marches forcées.
Dire quelque part : les journées que perdaient les insurgés, Plassans les passait à trembler ; après ou pendant l’épisode des terrasses (pour rattacher les deux chapitres)27.
De surcroît, les stations des colonnes d’insurgés, de Serge et d’Albine dans le Paradou, et les déploiements des bataillons d’armée créent une scansion qui retentit aussi sur l’enchaînement rythmé des chapitres du roman :
Je fais le chapitre en trois, de Mulhouse à Dannemarie <indiscipline>, de Dannemarie à Belfort <panique>, et dans le wagon28.
Je n’ai qu’à indiquer les promenades, parallèlement avec le développement de l’amour, de l’éducation du couple par la nature29.
À l’inverse, l’unique station balnéaire de La Joie de vivre, qui vit au rythme du « flux et du jusant » et que représente, dans le croquis, ce petit village du bout du monde et au bord de l’engloutissement, fournit un cadre spatial figé, assez adapté au drame philosophique du roman. La lutte entre le renoncement et la volonté de vivre se joue dans l’espace intermédiaire des brise-lames et des épis30.
L’opposition des forces révèle la syntaxe commune aux quatre croquis : l’arborescence (sous la forme de l’arbre, du nœud ou du croisement) fixe le cadre spatial d’une lutte vitale (action, réaction) amplifiée poétiquement par le thème de l’eau (mer, fleuve, rivière) et à laquelle participent les mythes d’Éros et de Thanatos : épis en front de mer contre une force naturelle d’annéantissement, armées françaises distribuées sur le front du Rhin et tentant de repousser la force écrasante d’invasion prussienne, débordement végétal du Paradou qui envahit l’espace aride par delà son enceinte, bataillons d’insurgés longeant le cours détourné de la Viorne et s’attaquant aux remparts des villes en chantant La Marseillaise. La confection d’un croquis d’ensemble s’impose lorsque des masses soumises à des déplacements multiples convergents ou divergents deviennent trop denses et complexes. Le croquis est alors le lieu des multiples recadrages et des digestions livresques : en effet, l’accumulation de documents variés, le débordement documentaire comme c’est le cas pour La Débâcle31, produit une logique et une dynamique lorsque le romancier visualise concrètement les lieux et les configurations de fronts en perpétuel mouvement. Le croquis, mais aussi le tableau à entrées multiples (mouvement de l’armée de Châlons en août 1870), ont le rôle d’« adjuvant cognitif » dans la construction d’un ordre à partir du mouvement brownien des choses et d’une Babel de documents. Le croquis stimule la saisie de l’essentiel en termes de coordonnées spatio-temporelles (la stratégie globale d’encerclement, de rabattement). Cette démarche rapproche sans doute le romancier des tacticiens professionnels.
La combinaison de motifs imaginaires qui gravitent autour de ce graphisme du barrage pourrait évoquer, néanmoins, plus qu’un scénario de fiction : l’image du père affleure sans doute ici sous la forme d’images refoulées. En effet, la correspondance de Zola rappelle les luttes paternelles pour défendre les intérêts d’un fameux barrage qu’il faut sauver de l’oubli et qui causa, du moins pour le romancier et l’enfant qu’il fut, la mort de l’ingénieur32. Dans les Notes préparatoires des Rougon-Macquart (1869), Zola insère entre les lignes une allusion discrète et pudique : « Croisement de race (italien et français) dans le roman militaire33 », et dans Germinal, l’ingénieur Négrel crée un barrage sur le canal.
De même, la part personnelle investie dans les croquis de La Joie de vivre et de La Faute de l’abbé Mouret n’est pas sans importance. Pour ce dernier roman, deux souvenirs de tableaux peuvent expliquer en partie l’allure générale du croquis. L’Enlèvement de Cézanne (1867), grande composition que le peintre offrit à Zola, montre des amants dans un paysage provençal. Le romancier l’eut sous les yeux toute sa vie. Mais une autre œuvre, moins citée, le tableau d’Ary Scheffer, Françoise de Rimini, inspiré d’un épisode de La Divine comédie de Dante, entretient, tant dans la forme que sur le fond, un lien direct avec le dessin de Zola. Les lignes et les plis des corps penchés du tableau rappellent les formes ondulantes qui semblent se propager, depuis le Paradou, au cœur d’un paysage érotisé, et l’inspiration tragique de la scène fait penser aux amours d’Albine et Serge. Zola possédait la gravure de Calamatta (1843), et, même si en 1868, il condamnait l’« extase maladive » du peintre, il écrivit quand même à Cézanne, en 1860, cette lettre :
Je ne sais pas si tu connais Ary Scheffer, ce peintre de génie mort l’année dernière [...]. Scheffer était un amant passionné de l’idéal, tous ses types sont purs, aériens, presque diaphanes [...]. Veux-tu rien de plus poétique, d’une poésie étrange et navrante, que sa Françoise de Rimini ? Tu connais l’épisode de La Divine comédie : Françoise et son amant Paolo sont punis de leur luxure en Enfer par un vent terrible qui toujours les emporte, enlacés, qui toujours les fait tournoyer dans l’espace sombre. Quel magnifique sujet ! Mais aussi quel écueil ! Comment rendre cet embrassement suprême ? ces deux âmes qui restent même unies pour souffrir les peines éternelles ! Quelle expression donner à ces physionomies où la douleur n’a pas effacé l’amour ?
Tâche de te procurer la gravure et tu verras que le peintre est sorti victorieux de la lutte, je renonce à te le décrire, j’y perdrai du papier sans seulement t’en donner une idée34.
Le souvenir de Scheffer, quelques descriptions livresques du Var, des images personnelles du pays natal, et les contraintes internes du projet romanesque sont à l’origine du dessin de La Faute de l’abbé Mouret. Mais il faut aussi insister sur la sensibilité picturale de Zola à l’égard des formes, et en particulier des lignes courbes. Baudelaire met en jeu, dans Le Thyrse (Petits poèmes en prose), dédié à Liszt, les valeurs du duo « droite-courbe » qui s’appliqueraient bien au croquis de Zola :
Ne dirait-on pas que la ligne courbe et la spirale font leur cour à la ligne droite et danse autour, dans une muette adoration ? [...]
— Le bâton, c’est votre volonté, droite, ferme et inébranlable ; les fleurs, c’est la promenade de votre fantaisie autour de votre volonté, c’est l’élément féminin exécutant autour du mâle ses prestigieuses pirouettes.
Ligne droite et ligne arabesque, intention et expression, roideur de la volonté, sinuosité du verbe, unité du but, variété des moyens, amalgame tout-puissant et indivisible du génie, quel analyste aura le détestable courage de vous diviser et de vous séparer ?
C’est une alchimie de cet ordre qui pourrait sans doute expliquer le croquis de La Joie de vivre.
À deux reprises, Zola a pu prendre des notes et ressentir quelques impressions face à la mer : à Saint-Aubin, en 1875 et à Piriac en 1876. « J’ai des mélancolies abominables devant la mer », écrit-il. Mais à Arromanches, il note les « belles falaises ». De Piriac, il évoque ce « village perdu » où il s’est installé et esquisse même une comparaison entre les deux lieux : « ce n’est plus une ligne de mer comme à Saint-Aubin, mais une largeur sans fin. » Surtout, les analogies graphiques entre le croquis de La Joie de vivre et celui de La Faute s’expliquent un peu plus dans ces lettres de villégiature :
Nous habitons une grande maison au bord de l’eau, suffisamment confortable. Nous avons l’église et le cimetière devant nous, un petit cimetière adorable, plein de fenouil, où tous les chats du pays vont jouer à cache-cache. [...]
Mais ce dont je suis ravi, c’est que ce bout de la Bretagne rappelle la Provence à s’y méprendre. [...] Dans les sentiers, il y a des papillons et des sauterelles qui me font croire à chaque instant que je suis sur la colline des Pauvres35.
L’étude des dessins d’écrivains, comme ceux de Zola, exige une approche plurielle, à la fois sémiotique, puisque le croquis possède, dans sa dimension autotélique, son code propre (topologie, échelle, distance, forme) et génétique, puisqu’ils permettent de préparer le travail au même titre que les dessins d’architectes36. Et, dans certaines ébauches, comme dans celle de L’Assommoir, le terme « dessin » appartient même au métalangage de l’œuvre en germe : « Si je prends la vie plate, bête et ordurière, il faut que je donne à cela un grand relief de dessin37 ».
Cependant, il faudrait, en plus, ouvrir les perspectives de la génétique textuelle sur celle de l’épistémologie génétique, fondée par J. Piaget38, car dessiner chez Zola c’est mettre en fonctionnement des compétences cognitives déjà bien connues de la psychologie contemporaine : les schèmes mentaux travaillent préalablement à une forme d’abstraction picturale. Le schème de l’arbre est une sorte de signature de l’auteur.
1 Ce titre est celui d’un ouvrage d’André Lhote, De la palette à l’écritoire, Paris, Corrêa, 1946. Lhote s’intéresse aux écrits de peintres.
2 Théodule Ribot, Essai sur l’imagination créatrice, Paris, Alcan, 1900, p. 26. Selon la classification de cet ouvrage, Zola aurait sans doute sa place parmi « les esprits à développements logiques », «rôle prépondérant de la patience. Travail surtout conscient. Actions lentes » (p. 134).
3 Pour une étude des croquis de Stendhal, voir l’article de N. Roelens, « Égotisme et autodérision chez Stendhal », Dix-neuf / vingt, oct. 96, p. 27-70
4 Il existe d’autres dessins techniques de mains étrangères dans les dossiers préparatoires : plans des Halles (Le Ventre de Paris), de l’Assemblée nationale (Son Excellence Eugène Rougon), de l’église Saint-Roch (Pot-Bouille), des terrains houillers (Germinal), dessins d’armoiries de Céard et vues d’édifices de Jourdain (Le Rêve), plan de la Bourse (L’Argent).
5 Cité par Larousse à l’article « dessin ».
6 Ces médecins psychiatres, auteurs d’études sur les hallucinations, sont cités par Taine dans son livre De l’Intelligence.
7 Voir J. Piaget, B. Inhelder, L’image mentale chez l’enfant : « L’image visuelle est une évocation figurale d’objets, de relations et même de classes, etc., qui les traduit sous une forme concrète et simili-sensible, tout en comportant un haut degré de schématisation » (PUF, 1966, p. 424) ; J.-P. Sartre, L’Imaginaire, Gallimard, 1940 ; M. Denis, Image et cognition, Paris, PUF, 1994.
8 Enquête médico-psychologique sur les rapports de la supériorité intellectuelle avec la névropathie. I. Introduction générale, Émile Zola, Paris, Société d’éditions scientifiques, 1896. Le docteur Toulouse écrit : « Parmi les images évoquées, ce sont les images visuelles qui prédominent de beaucoup (84 sur 87). À ce point, M. Zola est nettement un visuel ; les images, même olfactives sont exceptionnelles » (p. 243).
9 Dans sa lettre du 20 novembre 1866 il explique à Taine : « Les personnages imaginaires m’affolent, me poursuivent, – ou plutôt c’est moi qui suis dans leur peau. Quand j’écrivais l’empoisonnement d’Emma Bovary, j’avais si bien le goût de l’arsenic dans la bouche, j’étais si bien empoisonné moi-même que je me suis donné deux indigestions coup sur coup, – deux indigestions très réelles, car j’ai vomi tout mon dîner » (Correspondance, édition de Jean Bruneau, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », Gallimard, 1998, III, p. 562). Dans De L’intelligence (1870), Taine se sert de l’exemple de Flaubert pour démontrer le rapport étroit qui unit l’image et la sensation (« Nature et réducteurs de l’image », ouvr. cité, p. 87).
10 « Dans une école de dessin à Paris, écrit Taine, les élèves exercés à copier de mémoire le modèle absent disent, après quatre mois d’exercices, que “l’image” est maintenant devenue « beaucoup plus distincte, et que, si elle s’en va, ils peuvent la faire revenir presque à volonté » (De l’Intelligence, édition de 1923, p. 83).
11 Correspondance, Presses universitaires de Montréal-Éditions du CNRS, Paris-Montréal, 1978, I, p. 141.
12 Sur les fonctions des schèmes spatiaux dans les croquis, voir l’article de Ph. Hamon : « Génétique du lieu romanesque : sur quelques dessins d’E. Zola » dans Création de l’espace et narration littéraire, Université de Nice Sophia-Antipolis, 1997, p. 27-43.
13 Zola a l’habitude de glisser au cours de ses notes prises sur le terrain des « griffonnages » qui représentent de façon très schématique un motif architectral (une fenêtre en demi-lune dans Au Bonheur des dames, une grille ou une rampe dans Nana, une voûte dans La Terre). Il existe une trentaine de ces marginalia. Il s’agit déjà d’une mise en écriture et d’une première matérialisation de la perception géométrique.
14 Manuscrit conservé à la Bibliothèque Nationale, N.a.f. 10303, f° 37.
15 Pour le dessin de La Fortune des Rougon : manuscrit N.a.f. 10303, f° 2 ; pour celui de La Faute de l’abbé Mouret : N.a.f. 10294, f° 29 ; pour celui de La Joie de vivre, N.a.f. 10311, f° 336, et pour celui de La Débâcle : N.a.f. 10287, f° 178.
16 Il se manifeste dans de nombreux romans : dans la description de la chambre de Renée, dans celle du corps de Nana, et dans les paysages aussi (le château de Nana est perdu dans le « pli d’un coteau »). Dans l’ébauche de La Faute de l’abbé Mouret, il est le seuil symbolique qui sépare les deux vies de Serge : « Serge a perdu en partie la mémoire. Il n’a plus la tonsure, plus de soutane, plus d’église. Il n’entend même plus la cloche ; le parc est dans un pli de terrain, à cinq minutes du village » (N.a.f. 10294, f° 3. Sur cette image voir G. Deleuze, Le Pli, Leibniz et le baroque, Paris, Minuit, 1988).
17 Ébauche de La Joie de vivre, N.a.f. 10311, f° 152. Le pli est au paysage naturel ce que la barrière, le boulevard, le cardo et le decumanus sont pour le paysage urbain : il articule des zones, définit des seuils.
18 Sur « Hercule à la croisée des chemins », voir la lettre à Marius Roux au sujet des Mystères de Marseille : « Il nous faudra entièrement bouleverser le roman. Il faut que l’affaire de Roux soit méconnaissable, si nous voulons vaincre la censure. Mon idée reste celle-ci : un prologue dans lequel la naissance des deux enfants est expliquée ; suivre des routes différentes – la route du vice et la route de la vertu ; au dénouement tout s’explique, la vertu est récompensée et le vice puni » (4 juin 1867, Correspondance, ouvr. cité, I, p. 504). Voir encore la lettre à Cézanne du 1er août 1860 : « En relisant tes lettres de l’année dernière, je suis tombé sur le petit poème d’« Hercule », entre le vice et la vertu ; pauvre enfant égaré, que tu as oublié sans doute, et qui était également sorti de ma mémoire. » (ibid., p. 216).
19 Voir dans l’ancien plan de La Joie de vivre, la création du personnage de Lazare : « Ainsi il serait irritable et bon, lâche et courageux, chaste et lubrique, aimant sa femme et la trahissant, allant même un jour jusqu’à la frapper. L’homme ondoyant et divers en un mot. [...] Poltron et courageux, travailleur et paresseux, menteur et véridique, sincère et comédien. Le moi moderne actuel » (f° 378-380).
20 « Sedan », Le Figaro, 1er sept. 1891.
21 N.a.f. 10303, f° 31.
22 H. Mitterand remarque : « Dans le roman, Plassans est situé sur une route qui joint La Palud et St-Martin-de-Vaulx à Orchères et Sainte-Roure, en passant par Alboise et Plassans. Dans la réalité, Lorgnes est situé à mi-chemin, à vol d’oiseau entre La Garde-Freinet, Le Luc, et Vidauban, d’une part, Salernes et Aups d’autre part. Aucune route directe ne relie Lorgnes à chacun de ses deux groupes de localité » (Les Rougon-Macquart, édition établie par H. Mitterand, « Bibliothèque de la Pléiade », Gallimard, I, p. 1544).
23 N.a.f. 10303, f° 28.
24 N.a.f. 10303, f° 22.
25 N.a.f. 10287, f° 174. Sur la question de l’espace dans La Débâcle et dans le dossier préparatoire du roman, voir notre article, « Topologie d’un champ de bataille », Poétique, n° 116, nov 1998.
26 N.a.f. 10294, f° 224.
27 N.a.f. 10303, f° 28.
28 N.a.f. 10287, f° 176.
29 N.a.f. 10294, f° 45.
30 Les notes techniques sur les brise-lames reprennent le lexique de la mécanique des forces qui sert d’image dans la préface de La Fortune des Rougon : « Théorie des forces et résistances des matériaux. Pression sur les poutres inclinées. » (f° 317).
31 Ce débordement documentaire est souvent évoqué par Zola dans sa correspondance. Ces angoisses d’archiviste affleurent dans quelques romans : dossier d’instruction « épais » dans La Bête humaine, personnages confectionnant des « fiches » dans Pot-Bouille.
32 Zola travailla à sauver de l’oubli la mémoire de son père : voir la pièce en vers intitulé « Le Canal Zola », paru dans La Provence du 17 février 1859, et la « Vue du barrage » par Cézanne.
33 N.a.f. 10345, f° 6, Les Rougon-Macquart, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », Gallimard, V, p. 1741.
34 Lettre à Cézanne du 25 mars 1860, Correspondance, ouvr. cité, p. 141. Le catalogue de l’exposition de la Bibliothèque Nationale, organisée en 1952, pour le cinquantième anniversaire de la mort de Zola, montre que le romancier avait en sa possession tant le tableau de Cézanne que la gravure réalisée d’après le tableau de Scheffer.
35 Correspondance, p. 419-429 et 479.
36 Le « dessin apparaît comme un moyen extrêmement puissant de simulation des problèmes et des solutions, et comme un système privilégié de traitement de l’information spatiale », affirme J.-C Lebahar (Le Dessin d’architecte, simulation graphique et réduction et réduction d’incertitude, Roquevaire, Éditions Parenthèses, 1983, p.)
37 N.a.f. 10271, f° 162.
38 J. Piaget, B. Inhelder, L’Image mentale chez l’enfant, PUF, 1966.