Séminaire :
Séminaire international Léopold Sédar Senghor15/05/2024, 15h-17h GMT, 17h-19h (France). ENS, 45 rue d’Ulm, 2e étage, couloir B, milieu du couloir, salle Lettres 3. (et visio)
Cette étude se penche sur les interactions intellectuelles et diplomatiques entre le Brésil, le Portugal et le Sénégal pendant la période de décolonisation des années 1950 et 1960. Un constat s’impose : Senghor est largement reconnu pour son rôle dans la négritude et la francophonie, mais bien moins pour son appui au métissage culturel et à l’idée d’une communauté lusophone et latine. En s’appuyant principalement sur les discours de Senghor lors de sa visite officielle au Brésil en 1964, cette analyse vise à explorer son intérêt pour le métissage culturel, le Brésil et son projet lusophone. L’accent est mis sur les complexités des dynamiques raciales au Brésil et les échanges culturels qui ont influencé la perception de Senghor de la société brésilienne, ainsi que son admiration pour les idées de Gilberto Freyre. En outre, elle met en évidence l’intérêt diplomatique de Senghor pour freiner les guerres d’indépendance des colonies africaines lusophones vis-à-vis du Portugal. En conclusion, malgré les efforts de Senghor pour promouvoir une communauté lusophone sous l’égide du Brésil, des obstacles politiques et idéologiques ont pu entraver la réalisation de son projet.
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Serge Bourjea (ITEM), « Senghor : “La Négritude métisse”».
Senghor a voulu trouver le modèle d’un devenir-métis de l’humanité dans le Brésil des années 60, conçu comme « espérance de l’Afrique » et « modèle à suivre de la Civilisation de l’Universel ». Mais son vœu de voir naître « en Afrique de nouveaux brésils », s’est très vite affronté aux dictatures militaires brésiliennes (période 1964 / 1985) aussi bien qu’aux échecs de la décolonisation des pays lusophones d’Afrique (Angola, Mozambique, Guinée Bissau, période 1973-75). L’utopie, très ambiguë, d’un « métissage culturel mondial » né des racines négro-africaines de la Civilisation, semble dès lors avoir évolué vers une pensée plus subtile (et plus réaliste) de la « relation » humaine qui – se départissant des valences de « couleur et de race » – organise une poétique de la créolisation dont témoigne l’œuvre tardive. C’est ce que l’on voudra montrer à partir d’une nouvelle lecture de la Préface que donne Senghor, en 1976, au recueil du poète mauricien Édouard Maunick : ensoleillé vif ; et de l’hommage qu’il rend à Roger Bastide « sourcier et sorcier de la négritude », en 1976 également.