L’équipe « Autobiographie et correspondances » est née de la fusion de l’équipe « Genèse et autobiographie » , créée en 1995 sur une proposition de Philippe Lejeune (www.autopacte.org) et dirigée jusqu’en 2014 par Catherine Viollet (†), et de l’équipe « Écritures épistolaires », née en 2013 à la faveur de l’arrivée à l’ITEM de deux chercheurs CNRS (Jean-Marc Hovasse et Claude Knepper) qui travaillaient jusque-là au « Centre d’étude des correspondances et journaux intimes » de l’université de Brest.
L’hypothèse qu’il existe des liens privilégiés entre autobiographie et critique génétique est à l’origine de l’enquête transversale menée depuis vingt ans dans la première équipe sur la genèse de textes autobiographiques au sens large incluant journaux personnels, autoportraits, mémoires. Les études ont été menées à partir de corpus français et étrangers comprenant des auteurs canoniques (Stendhal, Pirandello, Perec, Triolet, Leduc, Yourcenar, Sartre, Delteil, Frisch, Kafka, Pozzi…) mais aussi des textes relevant de ce qu’il est convenu d’appeler les « écritures ordinaires ». Établir la genèse d’une autobiographie, c’est en quelque sorte élaborer la biographie de cette autobiographie, recomposer l’histoire d’un texte qui se veut l’histoire d’une vie, analyser les étapes de sa création et de son édition. Ce programme de recherche a conduit à observer, dans plusieurs cas, les mécanismes de transposition et de reprise du substrat autobiographique dans l’œuvre fictionnelle, qui souvent s’appuie sur les écritures privées comme les journaux, les carnets ou la correspondance.
Même si la question de savoir si les lettres appartiennent ou non en propre au dossier de genèse de l’œuvre est encore discutée, chacun s’accorde à reconnaître qu’elles sont essentielles à l’étude génétique des œuvres. L’étude conjointe de l’autobiographie et des correspondances permet donc d’élargir fructueusement le champ de cette enquête. Leur place respective dans l’œuvre d’un auteur est-elle marginale ou centrale ? Comment, par quels procédés d’écriture, construit-on la représentation de soi et de sa relation au monde ? L’écriture diffère-t-elle véritablement selon que l’on s’adresse à soi-même ou à un autre ? Comment se fabriquent les figures du « moi » au fil de la genèse ? Comment le même événement ou épisode biographique est-il récrit au fil des différentes versions, dans le journal ou dans les lettres ? Comment un journal personnel utilise-t-il la correspondance, et comment se métamorphose-t-il en d’autres œuvres ; comment ces deux formes fonctionnent-elles comme réservoir potentiel d’autres formes d’écriture encore ? Quelles métamorphoses leur font subir le processus d’édition ? Trouve-t-on trace dans les manuscrits de textes autobiographiques et dans les brouillons de lettres de faits de censure et d’autocensure ? Quelles relations s’établissent-elles entre le texte et le non-texte, le verbal et le non-verbal (aspects graphiques de la mise en page des lettres et des manuscrits, importance des blancs, éléments iconographiques tels que dessins, photos, etc.) ?
En étudiant les écrits personnels d’un point de vue génétique, l’équipe « Autobiographie et correspondances » a pour objectif de répondre à ces questions et à quelques autres. Elle a aussi pour but de favoriser, notamment par le biais de partenariats français et internationaux, leurs éditions en ligne ou sur papier. Ses membres collaborent actuellement à des projets tels que la publication, sous la direction de Florence Naugrette, des lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo (www.juliettedrouet.org), première édition d’une correspondance de cette ampleur (22 000 lettres) à faire l’économie du support papier, ou encore « Franz Liszt – Corpus », projet de publication en ligne d’un vaste corpus de documents relatifs au pianiste, compositeur et chef d’orchestre. Le groupe « Violette Leduc », qui avait été fondé en 2012 par Catherine Viollet, a quant à lui pour objectif d’étudier les manuscrits du dernier volume de la trilogie autobiographique La Chasse à l’amour (Gallimard, 1973), publié de manière posthume par Simone de Beauvoir.
Le séminaire de l’équipe est collectivement dirigé et organisé par Pierre-Jean Dufief, Jean-Marc Hovasse, Philippe Lejeune, Marie-Françoise Lemonnier-Delpy, Véronique Montémont, et Françoise Simonet-Tenant.